Tourné en 1941 et financé par le ministère anglais de l'information, 49ème parallèle n'est pas un film de propagande anti-nazi comme les autres. C'est avant tout une oeuvre formidable, basée sur une idée originale : raconter une histoire d'aventure en se plaçant du point de vue des "méchants". L'on suit pas à pas et de près l'épopée sanglante de personnages sans scrupules véhiculant une idéologie de haine et de violence. Seul l'un d'entre eux s'amendera au cours de leur périple, pour être aussitôt exécuté par ses compagnons. Ce parti-pris original et très subtil place le spectateur dans une position inédite où il ne sait s'il doit espérer la rédemption des fuyards, leur arrestation ou leur mort. Froid et réaliste dans sa première demi-heure, le film enchaîne sans temps mort les rebondissements, puis se densifie en une confrontation idéologique entre les fuyards et les populations qu'ils croisent.
Tandis que se succèdent à l'écran une pléthore d'acteurs célèbres, Powell et Pressburger (qui inaugurent ici une série de films mémorables) proposent ainsi un excellent état des lieux des forces en présence au début de la guerre : Français, Québecois, Inuits, émigrés allemands, Anglais, Américains croisent la route des fuyards, avec de multiples conséquences dramatiques.
Et comme nous sommes en 1941, la fin se veut un appel à peine voilé à l'intervention militaire américaine (le film a bien évidemment été distribué aux Etats-Unis, sous le titre The Invaders). A l'image des films américains interventionnistes qui se succéderont dans la période 39-45, 49th parallel est une merveilleuse illustration du talent d'un grand réalisateur (anglais cette fois) mis au service de l'effort de guerre.

Laurent Goualle, vu en 2002 sur le câble (Le film existe en vidéo).